Le matin clair, les moutons planent dans le ciel ; pour la première fois de ma vie, une pince à la main, je vais par les rues de ma cité. Je ramasse tout ce que je vois. Des gens me croisent, ils ne croisent pas mon regard. Je ramasse.
Je ramasse tout. Je ramasse surtout des mégots et des cartons publicitaires placés aux fenêtres des voitures ; des masques aussi, de tous les âges, comme si un certain carnaval sans fin.
Je ramasse ; ça donne chaud dedans dehors, et mes pensées sourient d’un autre sourire que celles qui me viennent à vélo ou en balade les bras ballants. Des pensées toutes simples, en liberté, mais qui ne vont pas loin. C’est bon de penser pas loin.
Le sac s’alourdit petit à petit, et du coup, quand je passe à côté d’un nid bien fourni, c’est Byzance : je pose le sac et le ramassage m’offre une bonne minute de pas lourd au bras.
Il est déjà plein. Je le laisse à côté de la poubelle de la place du Colibri. Comme un clin d’œil à ce que je viens de faire ?
Et de repartir vers un autre rythme. Celui que je quitte était bien doux.