« Mais heureusement qu’il y a la nuit, quand la raison est endormie » chantait Beau Dommage.
Faut-il qu’elle le soit, pour partir nettoyer les rues à 23 heures ?
Je me demandais si j’y verrais quelque chose : hormis les mégots, et encore, je vois tout. Je dois juste composer avec mon ombre qui cache souvent ce que j’avais aperçu à quelques mètres de là.
Je ramasse une cigarette non fumée. Qui l’a jetée, et pourquoi ?
Une femme sort d’une maison et part en voiture, où va-t-elle passé minuit ? Tout fait farine au moulin de mon imaginaire ; il y aurait tous les jours de quoi raconter vingt histoires au départ de ces banales découvertes.
Il fait très doux.
Il y a de quoi faire avenue des Cailles. Mon sac se remplit bien vite. Je me souviens du temps où je rêvais d’une fée du logis qui viendrait faire ma vaisselle pendant mon sommeil. Ce soir, on disait que j’étais la fée de l’avenue des Cailles, et j’imagine les riverains éberlués demain matin de trouver leur avenue toute propre… Effectivement, la nuit, la raison est endormie.
Je prends quelques notes sous les étoiles, dans le grand silence de ma cité. Ce soir, j’ai commencé ma balade en mai, je la termine en juin.