Je me réveille quelquefois en colère, sans même savoir pourquoi ni comment. La colère est peut-être aussi mystérieuse que la joie. Mais puisqu’elle ne me quitte pas, je m’en vais voir si la marche à pince peut y changer quelque chose.
J’ai l’impression de croiser d’autres colères, de ceux qui en ont assez de trouver des cartons d’import-export aux fenêtres de leur voiture. J’en ramasse un lot impressionnant. Pourtant, j’ai l’impression que petit à petit ma colère à moi m’abandonne.
D’un côté de la rue, on pourrait manger par terre, de l’autre… C’est le vent qui joue.
Tout à coup, je me souviens de cette petite fille accroupie au milieu de la place du marché, qui nommait et sériait imperturbablement les cailloux : « caillou dur, caillou mou » selon des critères connus d’elle seule. Et me voilà ramassant « dur, mou », et toute ma colère enfuie.
Je croise une de nos amies ramasseuses, on se raconte des histoires de ramassage bien sûr, et c’est un beau moment, souriant.
Mon sac est bien lourd tout à coup. Oh ? Ce sont des cent litres. Aurore a décidé que je devais me faire des muscles ? D’accord.
Sur le chemin du retour, je redescends par le côté « manger par terre » ; vu de près, ce n’est pas tout à fait vrai. Il faut traverser la rivière, quelquefois. Je me le promets.